jeudi, août 04, 2005

Fin de soldes.

 Je marche, la ville est déserte, je vois sur la rambarde d'un pont de l'île de la cité une paire d'escarpins marron à talons, ils semblent attendre leur propriétaire, posés là l'un à côté de l'autre, comme rangés au fond d'un placard, une paire de souliers abandonnés dans le soleil d'un matin d'août, cela donne un tableau assez mélancolique, Notre Dame en fond, la Seine en contrebas ; je me demande comment ils sont arrivés là ; une balade romantique, Paris de nuit, il fait bon, elle a mal aux pieds, retire ses chaussures et les porte à la main, une brise légère se lève, ils ont passé la soirée dans un grand restaurant, ont bu du champagne aux scintillements de la Tour Eiffel sur l'eau, se sont assis là pour s'embrasser, portés par la situation il lui a dit je t'aime à l'oreille et il s'est mis à pleuvoir, ils ont couru main dans la main pour attraper un taxi sur le Quai de la Tournelle et c'est au niveau du Quai d'Orsay qu'elle a relevé l'absence ; d'autres scénarii me passent par la tête ; le vent est froid, elle rentre chez elle et décide de changer son quotidien en faisant un détour par Notre Dame, quelques couples d'étrangers se tiennent par la main mais la saison touristique touche à sa fin, elle se demande ce qu'elle va manger en rentrant, un couple s'embrasse sur la rambarde du pont où elle se trouve, ils ont l'air tellement heureux, le tonnerre retentit, et la pluie commence à tomber, elle a oublié son parapluie, il faisait tellement beau ce matin, elle se dit qu'elle devrait courir pour s'abriter mais n'arrive pas à bouger, elle voit le couple s'engouffrer dans un taxi, elle a l'impression que la femme lui a souri au moment où sa tête disparaissait dans le véhicule, elle reste là, les cheveux dans les yeux, au milieu de ce pont, elle s'approche du bord, regarde en bas, retire ses mocassins marrons qui lui abiment les pieds, les pose délicatement sur le muret, comme elle fait tous les soirs en rentrant chez elle, se penche en avant ; la rue est déjà déserte, personne n'entendra le bruit de sa chute.

Episode V, on va au ciné voir un film japonais totalement chiant (on aurait dû aller voir les 4 fantastiques, en couple t'as un cerveau pour deux alors faut ménager) on continue sur une pizza place du Bourg-Tibourg et vlatipas que débarque Keanu Reeves, il s'installe à la terrasse d'en face (Féria Café), j'appelle ma meilleure amie pour qui il représente l'homme idéal (elle est d'accord pour reconnaître qu'il joue comme un pied mais bon c'est pas ce qu'elle attend de lui) juste pour la faire chier (j'aime mes amis), on rentre, on fait l'amour toute la nuit (avec mon homme pas Keanu) sur The Velvet Underground, c'est toujours aussi bon, on recommence le matin sur Massive Attack, il aime la bite ça on peut le dire, je crois qu'il m'aime beaucoup aussi, mais il est toujours avec sa meuf (qui porte le nom d'une compagnie de télécoms), ça commence légèrement *euphémisme* à me courir sur le haricot, j'ai peur de commencer à me blinder ; ce soir j'ai rendez-vous au pot de Robert Altman à la Villette, et après je prends la route du sud, le ciel est gorgé de nuages.


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